Commerce extérieur, la descente aux enfers

La France affiche la plus mauvaise performance depuis un quart de siècle
le Point 21 fév 2006 Romain Gubert

«Le déficit de notre balance commerciale ne doit pas être une source d'inquiétude majeure. » Ce qui est certain, c'est que Christine Lagarde est un ministre discipliné. Chargée du Commerce extérieur, elle n'est pas du genre à emboîter le pas aux déclinologues que Dominique de Villepin exècre tant. Seulement voilà : même avec la meilleure volonté du monde, certains chiffres laissent pantois. Avec un déficit commercial de 22.8 milliards d'euros en 2005 - après 8 milliards en 2004 -, la descente aux enfers continue : la France (5e pays exportateur mondial, avec 355 milliards d'euros d'exportations) affiche la plus mauvaise performance depuis un quart de siècle.

En cause, l'augmentation de la facture énergétique (8 milliards de plus qu'en 2004), l'euro fort et l'apparition d'innombrables concurrents comme la Chine. Le hic ? C'est que, dans le même temps, l'Allemagne, elle, réalise un sans-faute. Avec 160 milliards d'euros d'excédents, Berlin est le champion du monde de l'exportation. Le pays exporte deux fois plus que la France tout en supportant les mêmes inconvénients que son voisin (monnaie forte, coûts salariaux élevés et croissance faible).

Auteur d'un rapport pour le compte de Dominique de Villepin sur les faiblesses françaises à l'export, Patrick Artus (Caisse des dépôts-Ixis) est sévère. Selon lui, les entreprises françaises n'investissent pas assez les marchés dont la croissance frise les deux chiffres (la Chine, l'Inde, la Russie...) et ne sont pas assez en pointe dans les industries à forte valeur ajoutée. Autre point noir : nos PME, contrairement à celles d'outre-Rhin, sont trop petites et pas assez offensives sur les marchés internationaux. Parmi les 100 000 entreprises exportatrices, un dixième réalisent 95 % des ventes à l'étranger. La part des grands contrats emportés par la France est d'ailleurs en augmentation (40 milliards d'euros en 2005, contre la moitié un an avant). Plus grave : hormis quelques belles performances (Airbus et ses 13 milliards de recettes), certains secteurs où la France dominait sont en perte de vitesse. Exemple : les ventes de vins (où, il y a encore quinze ans, le pays disposait d'une part de marché mondiale de 70 %) ne cessent de diminuer. Mais, puisqu'il faut rester optimiste...